Commençons par le lai : il s'agit d'une des plus riches formes de notre poésie. Le lai raconte une histoire : cette histoire peut s'étendre sur plusieurs milliers de vers, notamment pour les grandes aventures, épiques ou amoureuses.
Apparu quelques décennies après l'an mil, le lai possède une structure très malléable, et peut se révéler très personnel. En effet, vous êtes libre d'organiser votre lai comme bon vous semble ! Le nombre de paragraphes et de vers par paragraphe est entièrement libre, seule la rime est obligatoire. Cette rime suit le schéma classique AA-BB, par exemple :
"Charlemagne mort, l’empire fit de même.
Son fils Louis, qui ne comprit pas le grand thème,
Laissa se briser l’harmonie paternelle.
Louis, dit le Pieux, fut bien piètre sentinelle."
Dans l'exemple précédent, les vers sont en alexandrins : s'il n'y a pas de règles obligatoires en métrie (nombre de syllabes) dans le cas du lai, on retient généralement l'octosyllabe, appliqué avec bonheur par Marie de France (1154-1199).
Cependant, encore une fois, vous êtes libres de choisir votre métrie. Le lai est la poésie de l'originalité. Mais attention, privilégiez toujours la beauté à la créativité, car n'oubliez pas que vos vers doivent être harmonieux, musicaux, puisque le lai est fréquemment chanté et accompagné à la lyre.
Reste à définir le ton de ce type de poésie, et ses sujets.
Un lai est toujours empreint de sensibilité, de méditation, d'un certain détachement ; il peut aller jusqu'à la mélancolie et la nostalgie... mais jamais de narcissisme ! L'auteur d'un lai ne parle pas de lui-même. Il raconte une histoire, et ne décrit pas une personne en particulier.
(Pour les petits plaisantins qui rêvent de composer des vers coquins, le lai ne convient pas à cet objectif. Qu'ils ne s'inquiètent pas, ils auront satisfaction dans la suite du cours...)
Quant aux sujets du lai, ils se divisent en trois inspirations principales :
- la matière de Bretagne, c'est-à-dire le cycle arthurien, qui comporte l'ensemble des légendes celtiques. Très abondamment utilisée.
- la matière de France, c'est-à-dire le cycle carolingien, qui décrit l'ensemble des épopées et des amours des contemporains de Charlemagne et de ses descendants. Très utilisée également.
- la matière de Rome, c'est-à-dire tout un corpus relatif à Alexandre le Grand, à Jules César et aux empereurs de Rome. Le problème est que nos auteurs font souvent de regrettables anachronismes.
Voilà pour le lai. Ce chapitre se termine, j'espère que cela est suffisamment clair. N'hésitez pas à poser des questions.
Gamelin scrute la salle, attendant qu'un élève se manifeste.